Les sandales de Willibrord

Un scoop archéologique provoque uns crise politique dans la plus anciennen ville du Grand-Duché. Chronique epternacienne …

  • Extrait du Land du 28 mai 2021

Un scoop archéologique provoque uns crise politique dans la plus ancienne ville du Grand-Duché.

Chronique epternacienne

…. Alors que Sam Tanson promet. une décision sur « la direction à prendre » dans un délai « relativement rapide », Wengler reste sceptique : « Wenn ich nicht mehr weiter weig, bild ich einen Arbeitskreis… Si l’État parle d’un groupe de travail, c’est que d’ici dix ans, il n’y aura toujours rien. » Il ne croit pas que le site archéologique représente une réelle plus-value touristique. « Wat ass do de Spektakel ? Combien de gens trouveront cela intéressant ? Combien de touristes vont dans les musées et veulent voir ça ? » Wengler avoue ne pas disposer de sondages fiables sur les raisons qui amènent les visiteurs dans sa ville. Mais il considère que la plupart seraient des « touristes normaux », venus pour des randonnées. Des propos étonnants de la part d’un maire qui vient d’introduire un dossier à l’Unesco dans l’espoir de voir sa ville reconnue patrimoine mondial.
La piste d’un musée soulève un autre problème : Les manuscrits enluminés fabriqués à l’abbaye ont été réquisitionnés en 1802 par la jeune République française. La plupart de ces livres anciens se trouvent désormais à Paris, d’autres à Nuremberg ou à Upsal. Echternach, il ne reste donc plus grand-chose à exposer, sauf des fac-similés. Afin de donner un corps muséologique à l’histoire médiévale, il faudrait donc recréer virtuellement les scriptoria et manuscrits. Sans parler des vestiges archéologiques datant de l’époque romaine et romane, et visuellement assez fades.

Mais en réalité, ce qui tracasse le maire, c’est la peur de se lancer dans une nouvelle « aventure financière » à l’issue incertaine. « J’entends qu’en cas de classement, l’État nous donnera des subsides. C’est exactement ce que je ne veux pas. Car cela voudrait dire que la commune sera le maître d’ouvrage. Et ça, nous n’allons certainement pas le faire. Financièrement, on ne pourra pas le supporter. Ce sera à l’État d’endosser ce rôle. » Le maire d’Echternach se dit encore marqué par l’expérience du Trifolion, dont la construction a fini par coûter deux fois plus qu’initialement prévu. « Et c’est sans parler des coûts ultérieurs… Toutes les institutions culturelles sont déficitaires, hautement déficitaires ! Et nous ne sommes vraiment pas une commune riche. » A l’heure actuelle, un simple plancher transparent avec une plaquette explicative, situé à l’arrière d’un projet immobilier aux dimensions réduites, semble donc se profiler comme solution de facilité. Un compromis qui, finalement, ne va satisfaire personne.

Old Boys

Echternach présente probablement la plus haute densité en patriotes locaux. Le Willibrordus-Bauverein se constitue en 1861, une Société d’embellissement est créée en 1880. Les études epternaciennes constituent un sous-genre entier de la nébuleuse « Luxemburgensia ». Le Lycée classique d’Echternach a produit une armada d’experts en histoire locale : Jean Engling, Nicolas Goetzinger, Paul Spang, Jos Massard, Georges Calteux, Pierre Kauthen, Jean Schroeder, Henri Trauffler. Cumulés, ces abbés de l’historiographie auront pondu des dizaines de milliers de pages sur Echternach, son abbaye, sa procession dansante, son dialecte, son saint patron. Ces professeurs du lycée d’Echternach sont, pour la plupart, eux-mêmes des anciens élèves du lycée d’Echternach, une reproduction en vase clos.

Ces Bildungsbürger, conservateurs du patrimoine (catholique), pèsent encore dans la vie politique locale. Or, ils apparaissent comme les derniers représentants d’une tradition en voie d’extinction. Marginalisée par l’émergence de l’Uni.lu et l’internationalisation des réseaux de recherche, la génération actuelle des historiens locaux, pour la plupart septuagénaires, n’a pas trouvé de successeurs. Les jeunes profs du lycée classique n’habitent plus Echternach, les liens organiques entre le gymnase et la ville se sont dissous. Or, il y a un réseau qui, étonnamment, est sorti indemne du XXe siècle, c’est celui des enfants de choeur. A Echternach, les messes sont célébrées avec jusqu’à trente servants d’autel, et le conseil communal compte deux élus se revendiquant des Eechternoacher Massdéiner : Ricardo Marques (CSV) et Ricardo Filipe-Pacheco (Déi Gréng). Affichant 70 membres, l’association ne connaît pas de limite d’âge et compte parmi les principaux influenceurs de la politique locale.

Auteur de l’article:
Bernard Thomas Au Lëtzebuerger Land depuis octobre 2013, Bernard Thomas (bt) écrit pour la rubrique Economie. Né en 1983, il a étudié l’histoire à Paris 1 (Panthéon-Sorbonne) et à la Humboldt Universität de Berlin. Son travail de Master 2 a été publié en 2011 aux éditions d’Lëtzebuerger Land sous le titre Le Luxembourg dans la ligne de mire de la Westforschung. Avant de rejoindre le Lëtzebuerger Land, il a travaillé comme journaliste et coordinateur pour le mensuel Forum. (source: land .lu)


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